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Convoi du 26 octobre 1942

Le 19 OCTOBRE 1942 le chef de la SIPO de BORDEAUX adressait à la Préfecture de la Gironde une lettre ordonnant de prendre les mesures nécessaires à l'arrestation de Juifs étrangers le jour même. Les listes de personnes à arrêter devaient être remises à GARAT et la police française devait se charger des arrestations ainsi que du transport des intéressés au camp de MERIGNAC où ils devaient être internés. Il était précisé que tout fonctionnaire français serait tenu pour responsable des personnes qu'il aurait à arrêter et que des "mesures sévères seraient prises en cas de négligence".
Sur l'exemplaire de la note allemande côtée D 388/6 figurent deux mentions manuscrites : "Monsieur GARAT" et "vu les S.S. qui maintiennent la demande".
Maurice PAPON a affirmé que la deuxième mention était de sa main et qu'elle constituait un compte rendu au Préfet Régional. Il a expliqué qu'en effet dès que la lettre de la SIPO lui avait été remise par GARAT, il était immédiatement allé voir Maurice SABATIER qui avait donné mission à GARAT d'entreprendre des démarches auprès des Allemands pour qu'ils renoncent à leur exigence. Cette tentative s'était soldée par un échec d'où la mention manuscrite qu'il avait portée.
Maurice PAPON indiquait qu'il n'était pas intervenu dans la remise à la police des listes établies par les Allemands et que seuls le Préfet Régional ou son Cabinet pouvaient donner des ordres à l'intendant régional de police.
Les arrestations étaient opérées dans la nuit du 19 au 20 octobre 1942 après accord de Jean LEGUAY.
Les conditions dans lesquelles les services de police sont intervenus ne sont connues que d'après les déclarations des Commissaires BONHOMME et TECHOUEYRES ainsi que de l'inspecteur PUNTOUS à la suite d'une plainte de Michel SLITINSKY et de sa soeur. Selon eux, le 19 OCTOBRE 1942 les inspecteurs et gradés de la Sécurité furent réunis dans les locaux de l'annexe de la Rue du Maréchal JOFFRE sans que leur soient précisées les raisons de ce rassemblement. Ils y étaient rejoints par des officiers allemands accompagnés de deux membres du service des questions juives. L'un d'entre eux Pierre GARAT était porteur des listes de Juifs à arrêter. Il donna l'instruction d'amener les adultes au camp de MERIGNAC et les enfants à l'hôpital des enfants. Il précisa aussi qu'il s'agissait de Juifs étrangers. Les équipes se composaient de deux inspecteurs et de deux feldgendarmes qui détenaient les listes et les adresses et ne revelaient aux inspecteurs français qu'au dernier moment le nom des personnes à arrêter, pour éviter des fuites et le sabotage de l'opération.
Ces éléments contredisent les affirmations de Maurice PAPON quant au fait qu'il n'est pas intervenu dans la remise des listes aux forces de police par GARAT, "dépositaire de ses instructions" de façon permanente.
I1 résulte encore des éléments recueillis dans le cadre de l'instruction menée en 1947 et de l'ordonnance de non lieu du 2 DECEMBRE 1947, que les inspecteurs PUNTOUS Pierre et DENECHAUD devaient arrêter la famille SLITINSKY demeurant 3 rue de la Chartreuse. La mère de famille malade et intransportable fut laissée sur place. Le père, Abraham SLITINSKY et sa fille Alice furent amenés à l'annexe de la rue du Maréchal Joffre puis internés au Camp de MERIGNAC. Michel SLITINSKY, âgé de 17 ans, parvint à s'enfuir , l'inspecteur DENECHAUD ayant tiré des coups de feu pendant qu'il s'échappait.
Michel SLITINSKY faisait 1'objet d'une note de recherche de l'Intendant régional de police du 21 OCTOBRE 1942.
Après cette nouvelle rafle Pierre GARAT rédigeait une note pour le secrétaire général de laquelle il ressort que la liste établie par l'autorité allemande comportait plus de 400 noms pour tout le département et que 40 personnes ont été arrêtées dans l'agglomération bordelaise. Ce "déchet" provenant selon lui de ce que la liste détenue par les Allemands comportait des noms de Juifs précédemment arrêtés ou ayant quitté BORDEAUX depuis longtemps. Il précisait que parmi les personnes arrêtées, 5 doivent être considérées comme non juives et être libérées, 4 sont dans une situation litigieuse qui devait être éclaircie avant le départ pour DRANCY et que 12 ont été laissées en liberté en raison de leur impotence ou de leur hospitalisation. Sur les 40 personnes arrêtées on comptait 14 Français
Néanmoins le directeur du camp de MERIGNAC a établi une liste de 73 personnes le 20 OCTOBRE 1942.
Le 21 OCTOBRE 1942 Maurice PAPON établissait pour le Préfet Régional un rapport des opérations menées les 19 et 20 OCTOBRE 1942 à l'attention du Préfet Délégué du Ministère de l'Intérieur.
Entre le 20 et le 26 OCTOBRE 1942 ont eu lieu des pourpalers entre l'autorité allemande et Pierre GARAT au cours desquels le cas des personnes arrêtées ou internées a été examiné. De ce fait Maurice PAPON n'a pu, là encore ignorer la présence d'enfants sur la liste.
Le 23 OCTOBRE 1942 la SIPO a demandé à la préfecture le transfert au camp de MERIGNAC de plusieurs Juifs internés au fort du Hâ ce qui fut fait par la police française, après un entretien avec Pierre GARAT afin qu'ils soient joints au convoi prévu pour le 26 OCTOBRE.
Selon la liste établie par le Directeur du Camp de MERIGNAC et adressée à l'Intendant régional de Police 128 personnes faisaient partie du convoi du 26 OCTOBRE 1942 à destination de DRANCY. Une liste distincte de 28 français était établie.
On relève parmi les personnes faisant partie du convoi : Anna RADWIN, Abraham SLITINSKY et Timée GELLER, âgés de plus de 60 ans, Samuel GELLER et Albert FOGIEL né le 12 JUILLET 1936 à CAUDERAN (Gironde), âgé de 6 ans.
Tous ont été transférés de DRANCY à AUSCHWITZ par le convoi du 6 NOVEMBRE 1942 et y furent exterminés.
Le convoi du 26 OCTOBRE 1942 a été escorté par la gendarmerie française sur réquisition du Préfet Régional.
Là encore Maurice PAPON a admis que les conditions matérielles d'organisation des convois mobilisaient plusieurs services de la Préfecture (ravitaillement, dispositif sanitaire, etc..) sous l'égide du Service des Questions Juives et notamment les chemins de fer.
L'instruction a permis de retrouver des factures établies à l'ordre du Service des Questions Juives de la Préfecture pour le transport de Juifs au camp de MERIGNAC les 19 et 20 OCTOBRE 1942 et de MERIGNAC à la gare Saint Jean le 26 OCTOBRE 1942. Des bons de carburant et d'huile, correspondant à ceux consommés pour les transports demandés ces jours là par le Service des Questions Juives de la Préfecture lui ont été réclamés.

ARRESTATION ET INTERNEMENT DES JUIFS DE NATIONALITE GRECQUE EN NOVEMBRE 1942

Le 5 NOVEMBRE 1942 Le Commandant de la SIPO de BORDEAUX adressait à "la Préfecture de la Gironde" un ordre d'arrestation et d'internement au camp de MERIGNAC visant tous les Juifs de nationalité grecque sans distinction d'âge. I1 était précisé que ces arrestations devaient être effectuées "d'extrême urgence par la police française".
Le 6 NOVEMBRE 1942 une note signée Maurice PAPON pour le Préfet régional et adressée au commissaire central, sous couvert de l'Intendant régional de police, ordonnait l'arrestation des Juifs de nationalité grecque dont la liste était jointe. Ce qui implique que la liste a été établie par le Service des Questions Juives de la Préfecture dès lors qu'il n'est pas fait allusion à ce document dans la lettre de la SIPO et qu'il est demandé au contraire aux autorités françaises de faire connaître le nombre des arrestations effectuées. I1 était encore demandé au Commissaire Central de regrouper les intéressés à BORDEAUX en vue de leur transfert au camp de MERIGNAC et de rendre compte téléphoniquement de l'exécution de ces arrestations.
Le 9 NOVEMBRE 1942 Maurice PAPON signait pour le Préfet Régional un rapport destiné au chef de la SIPO et établi sur du papier à entête du Service des Questions Juives pour transmettre la liste des Juifs de nationalité grecque recensés dans le département avec indication du résultat des recherches effectuées en vue de leur arrestation, et mentionner que sur 15 personnes recensées 4 ont été arrêtées dans la soirée du 6 NOVEMBRE 1942. Le même jour, Maurice PAPON signait une lettre adressée au Préfet délégué du Ministère de l'Intérieur pour l'aviser de l'opération d'arrestation qui avait été demandée par la SIPO.
Aucune des personnes visées par plaintes avec constitution de partie civile n'a été comprise dans ces arrestations.

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