Une bronchite retarde les débats - 23/10/1997

Maurice Papon qui souffre d'un bronchite a été hospitalisé, hier, en fin de matinée à Bordeaux. Son procès pour " crimes contre l'humanité " est suspendu jusqu'à lundi

Compte rendu d'audience Bernadette DUBOURG

Jeudi 23 octobre. Douzième jour d'audience. Pour la première fois depuis le début de son procès, le 8 octobre dernier, Maurice Papon n'est pas dans le box des accusés.
Avec une heure de retard sur l'horaire prévu, le président Castagnède prend place dans le prétoire et indique immédiatement : " Je viens d'être informé par le directeur de l'hôpital cardiologique Haut-Lévêque que Maurice Papon a été admis en soins intensifs. Il est sous examen et sous traitement médical. Son état ne lui permet pas de comparaître aujourd'hui et demain. Je vais donc suspendre les débats jusqu'à lundi, 13 h 30 ".
Cette décision n'est pas une surprise. Tout le monde sait que Maurice Papon a été hospitalisé en fin de matinée. La veille, déjà, il avait manifesté des signes de grande fatigue au cours de l'audience. Au terme de la déposition de Gilette Chapel qui, comme il l'avait déclaré lui-même l'avait beaucoup ému, il avait été pris de forts tremblements au point que le président avait d'autorité suspendu l'audience.

" Une voix atroce "

Le médecin du SAMU qui l'avait examiné, avait décelé une bronchite et s'était prononcé pour son hospitalisation mais, selon son avocat Me Jean-Marc Varaut, Maurice Papon s'y était lui-même opposé " par peur des interprétations malveillantes ".
A la reprise de l'audience, une heure plus tard, Maurice Papon semblait toujours très fatigué et c'est d'une voix faible qu'il avait fait une dernière déclaration après la déposition de l'Académicien Maurice Druon.
Il restait encore à entendre quatre témoins de moralité, cités par la défense, mais le président avait préféré suspendre l'audience, après s'être assuré que Jean Matteoli, Francis Graeve, Jean Jaudel et Robert de la Rochefoucault, pouvaient revenir le 4 ou le 5 décembre prochain. Hier, le président a précisé qu'en fait, ces témoins ne pourront pas être entendus à cette date, mais ultérieurement. Il est donc déjà peu probable que le procès puisse être terminé avant Noël comme celà était initialement prévu.
Mercredi soir, le médecin avait de nouveau souhaité que Maurice Papon soit hospitalisé mais il s'était encore heurté à un refus. L'accusé avait seulement accepté de prendre des antibiotiques avant de regagner la maison où il demeurait à Lacanau.
Dans la nuit, il aurait eu un nouveau malaise et, hier matin, son hospitalisation semblait inévitable. " Maurice Papon m'a téléphoné vers 10 h 30, expliquait Me Varaut, il avait une voix atroce, épouvantable. Je l'ai convaincu d'aller à l'hôpital ". Maurice Papon a quitté Lacanau vers 11 h 30 dans une ambulance du Samu, escortée par deux voitures de police et a été admis à Haut-Lévêque une heure plus tard.
Les médecins qui ont examiné Maurice Papon ont diagnostiqué une bronchite infectée et l'ont placé en observation en soins intensifs.

Des bouleversements

" Il n'y a pas de pronostic cardiaque inquiétant " indiquait Me Varaut qui pensait alors que Maurice Papon pouvait n'être absent qu'une journée. Mais le président Castagnède, dont tout le monde s'accorde à dire qu'il mène admirablement les débats, a préféré, au vu du certificat médical qui lui a été adressé en début d'après-midi, suspendre l'audience jusqu'à lundi.
Avant toutefois de lever l'audience, le président appelle à la barre Jean-Pierre Azema, le premier des cinq historiens qui devaient aborder durant trois jours, c'est à dire jusqu'à lundi, l'environnement de Vichy, la législation, le rôle de l'administration et l'appareil d'occupation allemand.
Costume en velours et écharpe en velours, Jean-Pierre Azema accepte de revenir mardi prochain : " Je dois simplement déplacer une soutenance de thèse ".
Me Boulanger s'inquiète alors du bouleversement du calendrier et du " désordre des témoignages " dont le président assure que lui-même et la cour en sont les premiers inquiets. Me Boulanger souhaite qu'à l'occasion de ce nouveau retard " on remette à plat tout le calendrier ". Ce qui sera indiscutablement fait puisqu'aujourd'hui devaient être entendus Philippe Burin et Jean Lacouture auxquels le président indiquera une autre date d'audition.
Seule chose certaine à ce jour, si le procès reprend bien lundi, la cour entendra ce jour-là, comme prévu, Robert Paxton -qui arrive de New-York- et Henri Amouroux. Les deux hommes ont une appréciation fort différente du gouvernement de Vichy.
L'interrogatoire de Maurice Papon qui devait débuter hier autour des années 1940-1942, depuis sa reprise de fonctions à Vichy jusqu'à sa nomination à Bordeaux en juin 1942, ne pourrait ainsi avoir lieu que mardi avant l'audition de Jean-Pierre Azema.
Quant au témoignage de Marc-Oliver Baruch sur l'organisation de la préfecture régionale de Bordeaux, qui devait avoir lieu le 28 octobre, il devrait également être repoussé.
Les faits à proprement parler devraient cependant bien être évoqués dès vendredi prochain 31 octobre, avec le transfert et la déportation de Léon Librach. " Il est hors de question de tout déplacer. Pour le reste, je ferai connaître les modifications que m'imposent les événements. Si toutefois d'autres mésaventures ne nous amènent pas à bouleverser encore le calendrier " a conclu le président avant de lever cette audience qui n'a duré que quelques minutes.
ïl est prévu que le procès reprenne lundi à 13 h 30.


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