Suspendu jusqu'à lundi - 25/03/1998

A la suite du décès de la femme de Maurice Papon, dans la nuit de mardi à mercredi, le procès a été suspendu hier. Deux jours avant le verdict. Il doit reprendre lundi à 14 heures

Compte rendu d'audience de Bernadette DUBOURG

Mercredi 25 mars. Quatre-vingt onzième journée d'audience. Maurice Papon n'est pas dans le box. Sans prononcer le moindre mot, le président donne immédiatement la parole à Me Jean-Marc Varaut qui devait poursuivre aujourd'hui sa plaidoirie, débutée la veille. « M. Le président, dit l'avocat d'un ton grave, vous le savez, mais je porte à la connaissance de la cour et des jurés que l'épouse de Maurice Papon est décédée au début de ce jour. Maurice Papon est reparti avec ses enfants à Gretz-Armainvilliers. Je ne ferai aucun commentaire. Maurice Papon m'a fait savoir tout à l'heure qu'il sera présent devant la cour, lundi à 14 heures ».
Le procureur général Henri Desclaux se lève : « Tout homme est égal devant la maladie et devant la mort d'un de ces proches. Je m'associe à la demande de la défense de surseoir jusqu'à lundi ». Au nom des parties civiles, Me Gérard Boulanger ajoute : « L'humanité entre souvent par la porte du malheur. Les parties civiles s'inclinent devant la demande de suspension et fait confiance à la cour pour sa décision ».
« L'audience reprendra lundi 30 mars à 14 heures » annonce le président avant de lever l'audience qui n'a pas duré plus de deux minutes. La salle est silencieuse.

Dans la nuit

Au premier jour du procès, le 8 octobre dernier, Me Varaut avait déjà fait évoqué l'état de santé inquiétant de l'épouse de Maurice Papon, malade depuis plusieurs années. En la quittant la veille, pour rejoindre Bordeaux et se constituer prisonnier, Maurice Papon pensait d'ailleurs ne jamais la revoir. Mais après sa remise en liberté, au troisième jour de son procès, il est régulièrement retourné à Gretz-Armainvilliers, sa ville natale où il avait pris sa retraite. Il y était encore le week end dernier.
« Dans le train qui nous ramenait dimanche soir à Bordeaux, témoigne Me Varaut, Maurice Papon a pris mes mains dans les siennes et m'a confié : « Sa vie ne tient plus qu'à un fil ». Lundi et mardi, il était très préoccupé ».
L'épouse de Maurice Papon, Paulette, agée de 89 ans, avec laquelle il était mariée depuis 1932, est décédée dans la nuit de mardi. Les policiers du Raid ont immédiatement alerté les deux filles et le fils de Maurice Papon qui étaient arrivés, mardi soir à Bordeaux, dans l'intention d'assister aux trois derniers jours du procès de leur père, et qui se trouvaient dans la maison où il demeure depuis le mois de novembre. Une des filles a alors prévenu Me Francis Vuillemin ainsi que le médecin du Samu, attachée à la surveillance médicale de Maurice Papon depuis le début du procès. C'est en leur présence que la nouvelle du décès de sa femme lui a été annoncée vers 1 h 30.
Maurice Papon a décidé de repartir aussitôt chez lui, à Gretz-Armainvilliers, sa ville natale. Seuls le préfet et le procureur général ont été informés de son départ. Il est parti vers 3 heures du matin, accompagné de ses trois enfants et escorté par les policiers du Raid, et est arrivé chez lui vers 9 heures du matin.
« Il est très affecté par la mort de son épouse, assurait hier matin Me Varaut. Elle était l'amour de sa vie. S'il n'a pas voulu donner à la cour ses carnets intimes, c'est parce qu'il n'était question que d'elle ». « Maurice Papon m'a souvent répété que devant les assises de Bordeaux, il se battait pour sa femme » ajoute le bâtonnier Marcel Rouxel.
Lundi soir, alors que Me Vuillemin achevait sa plaidoirie en évoquant comment en rentrant en prison, Maurice Papon avait placé la photo de sa femme et celle du général de Gaulle sur la table de la cellule, Maurice Papon avait difficilement retenu ses larmes.

Verdict mercredi 7 ?

Dès qu'il a été informé du décès de Mme Papon, le procureur général de Bordeaux a donné des consignes fermes pour que Maurice Papon soit entouré des plus grandes précautions médicales. Les expertises ordonnées par la cour d'assises, au début du procès, ont fait état, notamment, des risques cardiaques encourus par l'accusé.
Hier matin, Maurice Papon a cependant manifesté son intention d'être de retour à Bordeaux lundi. Si le procès peut reprendre, il est prévu que Me Varaut poursuive sa plaidoirie lundi après-midi, mardi matin et mardi après-midi. « Je suis interrompu dans mon élan » confiait toutefois hier l'avocat qui sera surement amené à « résumer » la première partie de sa plaidoirie, prononcée avant hier.
Selon le nouveau calendrier, Maurice Papon s'exprimerait mercredi matin et la cour rendrait son verdict mercredi soir et plus probablement dans la nuit de mercredi à jeudi.
Si le procès va à son terme, les questions se posent aussi sur l'influence que pourra avoir le décès de Mme Papon sur la décision des jurés.


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