Dans les couloirs, Me Rouxel et Varaut, les avocats de Maurice Papon (Crédit Rodolphe Escher)
Avec cette nouvelle suspension d'audience et l'incertitude sur l'état de santé de l'accusé, un doute s'installe sur l'avenir du procès
Bernadette DUBOURG
Lundi après-midi, avant de repartir pour Paris, Me Varaut et Me Vuillemin ont rendu visite à Maurice Papon à l'hôpital du Haut-Lévêque à Pessac où il est de nouveau hospitalisé à la suite d'une aggravation de sa bronchite.
« Son souci était de savoir comment avait réagi le président et quelle avait été l'attitude des parties civiles » indiquait hier Me Jean-Marc Varaut, ajoutant : « Maurice Papon ne s'est jamais senti de sa vie dans un si mauvais état de santé. Il est démoralisé d'être de nouveau hospitalisé d'autant qu'il n'est pas très facile de travailler à l'hôpital ».
Outre le bâtonnier Marcel Rouxel qui rend régulièrement visite à Maurice Papon, Me Vuillemin doit revenir demain pour travailler le dossier avec l'accusé et Me Varaut, lundi prochain.
Me Varaut qui assurait encore lundi que « Maurice Papon a la volonté d'affrontrer le procès jusqu'à son terme », affirmait cependant hier que « si d'autres interruptions avaient lieu, le procès devrait être arrêté ».
En six semaines de procès, les débats ont déja interrompus une semaine, du 23 au 31 octobre. Ils le sont de nouveau pour au moins une semaine et demi.
« S'il y a imprescriptibilité des crimes contre l'humanité, il y a prescriptibilité des souvenirs, assure le défenseur de Maurice Papon. La procédure d'assises est dénaturée car l'oralité des débats n'est plus assurée. Les jurés qui n'ont pas à leur disposition les pièces du dossier assistent à un procès décousu et on s'achemine vers de l'impressionisme judiciaire ».
Cette analyse n'est pas, on s'en doute, partagée par le parquet général. « Autant, au regard de l'état de santé de l'accusé, nous pouvons avoir des inquiétudes pour la suite de l'audience, autant nous manifestons notre fermeté pour la poursuite du procès. Le procès doit continuer avec un accusé apte à répondre, quitte à de nouveaux aménagements » assure le procureur général Henri Desclaux qui précise que « chacun doit faire un effort. Nous pouvons être complet, précis et rigoureux, tout en évitant des répétitions ».
« Il faut se faire à l'idée que le procès peut durer longtemps » répète Me Michel Touzet, l'un des avocats des parties civiles qui se sont réunies lundi après-midi, après la suspension d'audience. « Ces parties civiles, personnes physiques, subissent cet étirement du procès, mais celà n'enlève rien à leur détermination de rester le temps qu'il faudra pour arriver au bout du procès. Elles ont déjà attendu 16 ans, elles son prêtes à attendre encore le temps nécessaire ».
L'avenir du procès demeure directement lié à la santé de de l'accusé.
Le professeur Pariente qui devrait examiner Maurice Papon dans le courant de la semaine, doit se prononcer sur « l'évolution prévisible » de cette pneumopathie, et indiquer à la cour « une date à laquelle l'état de santé de Maurice Papon lui permettra de comparaitre à nouveau devant la cour d'assises ». Ce pourrait être au plus tôt, le jeudi 27 novembre, comme fixé par la cour lundi. Ce pourrait également être plus tard. « L'important, c'est que l'accusé soit rétabli » convient le procureur général.
Les débats ont été interrompus alors que le président Castagnède examinait les responsabilités de l'accusé sur le service des questions juvies à la préfecture de la Gironde.
Me Touzet refuse d'ailleurs l'idée selon laquelle « on ne serait pas encore rentré dans le vif du sujet » : « Ce n'est pas vrai, on est en plein dedans. Lorsque le président interroge Maurice Papon sur sa délégation de signature et son autorité sur le service des questions juives, nous sommes au coeur du sujet. Car ensuite, lorsque nous examinerons les convois, ce sera à la lumière de cette responsabilité. Et le plus gros du travail sera fait ».
Si le procès reprenait, même avec un mois de retard sur le calendrier initial, la menace d'un nouvel arrêt planerait à jamais sur les débats. « La frustration et la douleur des parties civiles ne seraient jamais guérissables si le procès venait à être interrompu » concluait lundi Me Michel Zaoui.
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