L'acquittement plaidé - 23/03/1998

Les trois avocats de Maurice Papon vont plaider son acquittement durant quatre jours. Le verdict est attendu vendredi

Bernadette DUBOURG

Le procès de Maurice Papon s'achève cette semaine. Le verdict est, en effet, prévu vendredi après quatre vingt treize journées d'audience et près de six mois de débats.
Après deux semaines consacrées aux plaidoiries des 22 avocats des parties civiles puis au réquisitoire soutenu conjointement, mercredi et jeudi derniers, par l'avocat général Marc Robert et le procureur général Henri Desclaux qui a demandé 20 ans de réclusion criminelle, la privation des droits civiques, civils et de famille contre Maurice Papon, la parole est exclusivement réservée, cette dernière semaine, à la défense de Maurice Papon, puis en tout dernier lieu, à l'accusé lui-même.
Le bâtonnier Marcel Rouxel, seul avocat bordelais de Maurice Papon, est le premier à intervenir ce matin (à partir de 10 heures). Il évoquera plus particulièrement " le contexte bordelais " dans lequel les faits se sont déroulés il y a 55 ans. Me Rouxel était alors étudiant à Bordeaux.
Cet après-midi, Me Francis Vuillemin, le benjamin des avocats du procès qui plaidera également pour la première fois devant une cour d'assises, s'attachera à décrire la personnalité de Maurice Papon, sa carrière de haut fonctionnaire dans l'administration jusqu'à devenir ministre du budget de Valéry Giscard d'Estaing, mais aussi sa résistance " controversée " pendant l'Occupation, puis l'épuration qui a épargné l'ancien secrétaire général de la préfecture de Bordeaux, nommé fin août 1944 directeur de cabinet du commissaire de la République de Bordeaux, Gaston Cusin.
Me Jean-Marc Varaut interviendra les trois jours suivants, l'après-midi uniquement, pour une plaidoirie " de 12 à 15 heures ", " la plus longue de l'histoire judiciaire pour le plus long procès de l'histoire de France ". Mardi, il exposera le contexte historique, juridique et procédural du dossier. Mercredi, il discutera les charges, reprenant les quatre rafles et les huit convois dans leur chronologie. Jeudi, il abordera la notion de " crime contre l'humanité " et tentera de démontrer que Maurice Papon n'avait pas connaissance de la solution finale. Ce sera l'argument essentiel pour plaider l'acquittement de Maurice Papon.
Maurice Papon, comme dans tout procès d'assises, aura la parole le dernier. Il s'adressera à la cour et aux jurés, vendredi matin, avant que ceux-ci se retirent pour délibérer. Leur verdict n'est pas attendu avant vendredi soir, voire dans la nuit de vendredi à samedi.
Que Maurice Papon soit acquitté ou condamné, il quittera aussitôt, libre, le palais de justice de Bordeaux pour rejoindre sa maison de Gretz-Armainvilliers en Seine et Marne. La cour d'assises l'a, en effet, remis en liberté au troisième jour du procès, le 10 octobre dernier, en raison notamment de son âge et son état de santé, et ne peut prononcer de mandat de dépôt à l'audience, en cas de condamnation, comme cela est possible devant un tribunal correctionnel, par exemple. Tout au plus Maurice Papon devrait-il se constituer prisonnier avant l'examen du pourvoi en cassation qu'il formera s'il est condamné. Mais là encore, il pourrait obtenir une dispense de la juridiction de jugement.
Pour éviter tout débordement à l'énoncé du verdict, les mesures de sécurité seront renforcées et le palais de justice de Bordeaux sera plus que jamais placé sous haute surveillance.

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