Un cas de conscience pour les hôteliers - 13/10/1997

L'hôte Maurice Papon pose un cas de conscience inédit pour la plupart des hôteliers

Jean-Paul VIGNEAUD

De l'aveu de tous, jamais les hôteliers de la Gironde ne s'étaient trouvés dans une telle situation. " C'est bien la première fois que je suis confronté à un tel problème ", reconnaît Christian Sauvage, patron du " Pont Bernet " (hôtel installé au Pian- Médoc), également président régional du Syndicat des hôteliers.
Ce dernier dit ne pas avoir réfléchi longtemps cependant : " Comme d'autres, j'ai été contacté. Une personne circulant en voiture officielle est spécialement venue pour me demander d'accueillir Maurice Papon. J'ai refusé tout net. Si Maurice Papon est jugé innocent je le regretterai peut-être un jour mais s'il est reconnu coupable, je serai très fier d'avoir eu cette position ferme, ne serait-ce qu'en mémoire de tous les enfants morts en déportation."

Des menaces

Et le refus de vente alors ? " Nous n'avons pas le droit de refuser de vendre et de choisir notre clientèle sauf si la sécurité de nos établissements est en jeu. C'est le cas ici ! ", répond sans détour Christian Sauvage.
Il est vrai qu'héberger Maurice Papon engendre des risques. Les hôtels où séjournent depuis le début du procès les avocats de la défense et proches de l'accusé n'arrêtent pas de recevoir des menaces et vivent difficilement le quotidien. C'est le cas du Saint-James à Bouliac. On comprend mieux pourquoi Jean-Marie Amat, le patron de l'établissement, a été l'un des tout premiers à refuser d'accueillir Maurice Papon. Le Relais de Margaux n'a pas échappé non plus ce week-end aux menaces en tout genre.
Le refus de l'hôtelier peut également découler de raisons purement commerciales. Voici l'avis de Serge Pétouin, patron du Relais de l'Estuaire à Etauliers, président du Syndicat des hôteliers et restaurateurs de la Gironde. " Ne pas oublier que nous sommes là pour travailler et faire prospérer nos entreprises ", explique-t-il. " Le moindre écart et c'est la catastrophe. Nous ne pouvons vraiment pas accueillir un client quelques semaines en sachant que tous les autres, ceux qui nous font vivre toute l'année, les habitués et fidèles, vont nous délaisser pour des raisons de sécurité ou personnelles et ne reviendront peut-être jamais. "

L'image d'un établissement

Pour le président départemental, c'est toute l'image d'un établissement et même d'une région touristique qui peut également en pâtir : " Imaginez des touristes étrangers qui débarquent dans un hôtel entouré de policiers et gendarmes armés jusqu'aux dents. Bonjour la France ! L'année suivante, à coup sûr, l'organisateur du voyage changera de circuit. "
Alors que préconise-t-il ? " La meilleure solution serait que Maurice Papon déniche un appartement ou une maison à louer. Ou alors qu'il trouve un hôtel fermé habituellement en fin de saison touristique, lequel pourrait faire exceptionnellement des prolongations en lui réservant une partie de l'établissement. Tout le monde y trouverait son compte : le professionnel comme les services de sécurité qui pourraient investir les lieux sans conséquences. "


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