Le pourvoi en cassation était déjà prêt au soir du verdict
Bernadette DUBOURG
Maurice Papon n'avait pas éludé l'hypothèse d'être condamné. Lorsqu'il a repris place dans le box de la cour d'assises, et avant même d'entendre le verdict, il a sorti une feuille blanche de sa mallette. Il s'agissait d'un mandat rédigé au nom d'un de ses trois avocats, le bâtonnier Marcel Rouxel, pour former un pourvoi en cassation à l'issue du verdict de condamnation.
Dès la fin de l'audience, il a remis au bâtonnier Rouxel ce document manuscrit, paraphé de cette signature qui est parfois apparue sur les écrans vidéo de la salle d'audience, au bas de notes, comptes-rendus ou réquisitions, signés par le secrétaire général de la préfecture de Bordeaux.
" Je vais immédiatement former ce pourvoi ", a confirmé Me Rouxel après l'audience. S'il confiait également son soulagement que la cour ait " écarté le plus horrible des crimes, l'assassinat ", il convenait aussi qu'il y avait " une telle charge émotionnelle dans ce procès, qu'il était difficile que la cour blanchisse Maurice Papon ".
Même condamné à 10 ans de réclusion criminelle, Maurice Papon a donc quitté libre le palais de justice de Bordeaux sous bonne escorte policière. La cour d'assises qui l'a remis en liberté au troisième jour de son procès, le 10 octobre dernier, n'avait pas le pouvoir de prononcer un mandat de dépôt à l'audience. Maurice Papon restera donc libre, au moins jusqu'à l'examen de son pourvoi en cassation qui pourrait intervenir d'ici 6 à 8 mois. Et encore, à ce stade de la procédure, il pourra demander à la cour de Bordeaux de le dispenser de se constituer prisonnier.
Si la cour de cassation annulait l'arrêt de Bordeaux, au seul motif d'un vice de procédure, le procès serait rejugé devant une autre cour d'assises.
Si la cour rejetait purement et simplement ce pourvoi, la condamnation de Maurice Papon deviendrait définitive et donc exécutoire. Mais on imagine mal le retour de Maurice Papon en prison, non seulement en raison de ses 88 ans, mais aussi parce que des médecins experts se sont déjà prononcés en octobre sur l'incompatibilité entre son état de santé et une détention. Il pourrait bénéficier d'une grâce.
Tout au plus, Maurice Papon perdrait-il ses droits civiques, civils et de famille ainsi que ses décorations. Il est notamment commandeur de la Légion d'honneur, commandeur de l'ordre national du Mérite, croix de la valeur militaire avec palme et croix de combattant volontaire de la Résistance. Plusieurs parties civiles, notamment les associations d'anciens combattants, ont dit leur attachement à la perte de ces décorations.
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