764 questions et trois subsidiaires - 31/03/1998

Bernadette DUBOURG

L'incertitude planait hier soir sur le prononcé du verdict aujourd'hui comme prévu, ou demain jeudi. Tout dépend, en fait, de la longueur des interventions des avocats qui devraient donner leur avis sur les trois questions subsidiaires déposées hier par Me Jean-Marc Varaut :
1- La contrainte morale et matérielle exercée en France par le Sipo-SD, organisation criminelle condamnée à Nuremberg, manifestée par des menaces réitérées de représailles, rendues crédibles par de nombreuses exécutions, ne créait-elle pas une force insurmontable à laquelle l'accusé n'avait pas les moyens de résister, ne serait-ce qu'à raison du risque pour ses subordonnés de telle sorte qu'en tout état de cause il n'a pu commettre les infractions reprochées ?
2- L'accusé avait-il connaissance du plan concerté d'extermination des juifs par les nazis et a-t-il eu le mobile et la volonté d'y participer ?
3- Une démission de Maurice Papon, en diminuant son activité résistancte, aurait-elle modifié en quoi que ce soit le mécanisme instituionnel de destruction des juifs à Bordeaux ?
Ce matin, à l'issue de sa plaidoirie qui devrait durer une heure à une heure et demi, Me Varaut motivera sa demande. Le parquet général et les avocats des parties civiles ont déjà annoncé leur intention de répliquer, ne serait-ce que pour solliciter le rejet de ces questions. Ils pourraient également en profiter pour apporter des « démentis à certaines affirmations de Me Varaut », même si ce n'est pas l'usage. Mais, rien dans ce procès n'est conforme à une audience classique.
En fonction de l'heure, et après s'être prononcé sur l'opportunité ou non de rajouter ces trois questions subsidiaires aux 764 questions auxquelles les jurés doivent déjà répondre, le président décidera d'achever l'audience en donnant la parole à Maurice Papon ou choisira de renvoyer cette déclaration au lendemain matin.
Ce n'est qu'après l'ultime propos de l'accusé, aujourd'hui ou demain, que les neuf jurés (un vendeur de 27 ans, une dame sans emploi de 59 ans, une professeur d'école de 40 ans, un agent de maîtrise de 55 ans, un rédacteur juridique de 33 ans, un retraité, ancien cadre des ressources humaines, de 63 ans, une maîtresse auxiliaire de 26 ans, une comptable de 34 ans et un électrotechnicien de 40 ans) se retireront pour délibérer avec les trois magistrats de la cour, le président Jean-Louis Castagnède, 53 ans, les deux assesseurs, Irène Carbonnier, 48 ans, et Jean-Pierre Esperben, 50 ans. (Lire ci-dessous)
Le délibéré pourrait durer une douzaine d'heures, le temps pour les jurés de répondre aux 764 questions déjà formulées, selon un plan extrèmement simple. Pour chacune des 72 victimes visées par l'arrêt de renvoi, ils devront répondre à plusieurs questions : Dire d'abord si chaque victime a bien été arrêtée, séquestrée ou assassinée (parfois les trois), dire -le cas échéant- si elle était mineure ou si la séquestrationn a duré plus d'un mois, dire ensuite si ce crime entre dans le cadre d'un plan concerté. Puis -et c'est la question essentielle-, dire si Maurice Papon est coupable « d'avoir, par aide ou assistance, sciemment facilité la préparation ou la consommation de l'action spécifiée et qualifiée » aux précédentes questions.


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